Sophie m’a contacté parce qu’elle a décidé de faire péter ses barrières et de s’affirmer. Elle pratique le trail, l’ultra trail même. Pourtant elle n’a pas complètement confiance en elle. Elle se livre ici et raconte comment elle en est venue à courir plus de 100 kms. Let’s Go Girl !
Quel(s) sport(s) pratiques-tu ? Et à quelle fréquence ?
Je pratique principalement la course à pied et le trail. J’enchaine les gros défis dans lesquels je me lance avec mon chéri. Donc, forcément, je cours 3 à 4 fois par semaine pour espérer pouvoir aller au bout de ces défis fous.
Je fais aussi pas mal de vélo, principalement pour aller au boulot et me déplacer dans Paris (au moins 20 kms par jour, mais je déteste tellement le métro que je préfère 100 fois ça) et ça me fait un bon complément pour mes entraînements.
Et pour me permettre de souffler, de me détendre et de m’étirer, je pratique aussi un peu de yoga (une séance par semaine chez moi) et la natation (même si ma piscine préférée est actuellement fermée pour travaux).
Quand as-tu commencé le sport et quelles étaient les raisons à l’époque ?
Plus jeune (à partir de 6 ans), j’étais inscrite en natation pour apprendre à nager. Comme j’avais un bon feeling avec le prof, j’ai continué jusqu’à la compétition. Rétrospectivement, je pense qu’à l’époque je le faisais pour que mes parents soient fiers de moi. Concrètement, les cours étaient rébarbatifs. J’ai arrêté à l’adolescence, parce que je n’avait tout simplement plus envie. Puis, j’ai testé ponctuellement tout un tas de sport (natation synchronisée, ski de fonds…) par curiosité.
J’ai recommencé à pratiquer une activité physique régulière à 24 ans. Juste après mes études, j’ai été prise en stage dans une association avec notamment pour mission de construire et d’animer une équipe de coureurs solidaires pour le Semi-Marathon de Paris (en collaboration avec un coach pour les conseils sportifs).
Je n’étais plus du tout sportive à l’époque, j’avais 15 kgs de plus et une estime de moi au ras des pâquerettes. L’esprit d’équipe, le dépassement de soi que j’ai observé pendant les entraînements et la course en elle-même m’ont donné envie de me lancer.
« Contrairement à la natation, je considère la course à pied comme un sport de compétition avec soi-même plus qu’avec les autres, ce qui me correspond beaucoup plus. »
Comme j’ai ensuite été embauchée dans cette même association pour continuer à développer la course solidaire. L’année suivante, je me suis lancée : je me suis inscrite au Semi-Marathon de Paris en 2011. J’ai suivi les entraînements collectifs et les conseils du coach… Et j’ai coincé mon doigt dans l’engrenage de la course à pied !
La machine était lancée. J’ai fini par passer le cap du Marathon en 2014 puis celui du trail et des courses de plus en plus longues.
Où pratiques-tu ton sport et quel est ton spot favori ?
Un peu partout dans les différents spots que j’ai découvert ou que je découvre encore à Paris et en région parisienne : à Vincennes, au parc Montsouris et à la cité Universitaire mais aussi au Parc de Sceaux, dans le bois de Verrières et dans la vallée de la Chevreuse.
J’habite au Sud de Paris, près de Denfert, donc un petit coup de RER et nous voilà au vert pour en profiter et prendre un grand bol d’air. C’est possible, même à Paris !
Pour la natation, je vais à la piscine Georges Vallerey porte des Lilas. Et sinon, je traverse pratiquement Paris à vélo pour aller de chez moi à mon lieu de travail.
Qu’est-ce que t’apporte le sport au quotidien ?
Je suis quelqu’un de très énergique et j’ai besoin de me dépenser. Rien que pour pouvoir bien dormir, tout simplement. Je suis aussi de nature stressée donc le sport me permet clairement de décompresser et de me canaliser.
« Bon et puis, il ne faut pas se mentir : le sport me permet de me dépasser, de me prouver à moi-même de quoi je suis capable et d’aller toujours plus loin dans le dépassement de soi. »
Et puis surtout, pour moi le sport c’est la solidarité : celle entre les coureurs bien sûr, qui m’a attiré en premier, qui m’impressionne de plus en plus (particulièrement importante sur les trails, je trouve) et me réchauffe toujours autant le coeur.
Et la solidarité envers les causes et projets qui me touchent aussi. J’ai toujours fait en sorte de courir solidaire autant que je le pouvais. Tout d’abord aux couleurs de mon association, Aide et Action, puis en collectant plus de 6 000 euros autour de mon premier Marathon en faveur de la recherche pour la Sclérose en Plaques. Et enfin en co-créant l’application de running solidaire Km for Change. Il s’agit d’une application qui permet à tous les coureurs de tous niveaux et où qu’ils soient de transformer leurs km en euros pour des projets associatifs et sans sortir leur CB puisque ce sont les entreprises qui financent.
Je pense que la solidarité fût mon principal moteur, quelque part je voulais finir chaque course avec cette motivation. Avec l’évolution de ma pratique, je pense un peu plus à moi sans pour autant laisser de côté cette solidarité qui m’a tant boostée.
« La course à pied m’a permis de développer des capacités que je ne soupçonnais pas, je découvre une force en moi incroyable. J’ai pris des décisions personnelles de vie grâce à la confiance en moi que j’ai développé au travers de la course à pieds. »
Après réflexions, je pense aussi qu’il existe une différence entre la natation et la course à pied. Quand je cours, je me bat principalement contre soi-même, tandis que pour ce qui est de la natation, au lieu de se battre contre les autres.
Le sport a-t-il changé la vision que tu avais de toi et ta vision du sport en elle-même ?
Je crois bien que cela a complètement changé la vision que j’avais de moi-même. Avant de commencer la course à pied, je n’avais pas confiance en moi. Et pas seulement au niveau de mes capacités physiques, je doutais de tout. Même de ma capacité à pouvoir allier travail, sport et vie sociale. Je ne pensais tout simplement pas que le sport était fait pour moi. Je me dévalorisais constamment, heureusement tout cela a bien changé, j’ai enfin une estime de moi correcte et j’ai découvert une force que je pouvais utiliser dans mon quotidien. Je doute encore un peu de moi, mais j’ai les bons outils pour me lancer et tenter de nouveaux défis malgré tout.
J’espère montrer à mes proches que tout est possible. Quand on croit en soi, qu’on se donne les moyens. Je souhaite montrer que chacun peut agir à son échelle et avec ses petits moyens pour un monde meilleur (collecter pour une course, courir solidaire avec une application ou tout simplement ramasser des déchets lors d’un entraînement ou même d’une balade).
Avant de commencer, la course à pied était synonyme de douleur. Je ne comprenais pas, je me disais « pourquoi tant de souffrance ? » Aujourd’hui je fais partie de ces masos qui courent des marathons et des ultras-trails.
« Le sport est avant tout du plaisir, et un challenge permanent qui me conforte dans l’idée que tout est possible. »
Quels ont été ton meilleur et ton pire moment sportif ?
Difficile de choisir un meilleur moment sportif. Je ne vais pas être originale mais je ne peux que citer l’arrivée des courses où j’ai le plus souffert mais dont je suis la plus fière.
Parmi ces courses, je citerai l’arrivée de l’OCC (la “petite” course de l’Ultra Trail du Mont Blanc). Toute la ville de Chamonix vibre pour le trail pendant une semaine et quelle que soit l’heure où tu arrives. Peu importe ton classement, tu es accueilli comme au sommet de l’Alpe d’Huez sur le Tour de France. Après 14 heures à souffrir dans les montagnes, il y a de quoi vous donner des ailes !
Niveau pire moment sportif, la liste est moins longue. J’ai été parfois bonne dernière sur certaines courses mais je n’en garde pas forcément de mauvais souvenirs (peut-être juste une vocation de voiture balais ?).
Je peux citer ma course Paris-Versailles en 2014 où j’ai eu le malheur de poser le pied sur une bouteille pleine abandonnée par un coureur sur la chaussée et de devoir finir la course en boitant.
Quel est ton prochain objectif ?
Je viens de finir mon objectif 2018 : le Grand Raid de l’Ultra Marin, une course de 177 kms non stop autour du Golfe du Morbihan. C’était la première fois que je faisais une telle distance, j’ai eu à gérer deux nuits sans sommeil, à pousser mes limites et mon mental dans des retranchements encore inexplorés. C’est la chose la plus difficile et la plus belle que j’ai faite de ma vie. Ça m’a permis de me découvrir un mental à toute épreuve, et c’était aussi l’occasion de partager ma passion avec ma petite soeur et de ça nous a rapproché. Je n’ai pas de gros objectif pour le moment, juste des courses pour la forme.
En tant que femme a-t-il été plus ou moins difficile de commencer (et d’exercer) une activité physique par rapport à tes barrières, la société, le regard des autres ?
J’avoue que le plus dur, c’est le regard des autres. Même si j’ai perdu beaucoup de poids, je n’ai pas un gabarit mince ou même une stature de sportive. Du coup, je me fais souvent dévisager de haut en bas quand je parle du sport que je fais et des défis que je me lance. Les préjugés ont la vie dure et même si je n’en souffre pas forcément sur le coup car je suis d’un naturel optimiste, j’y repense souvent lors des moments de doute et je m’en passerai bien.
D’une manière générale, je trouve que les femmes se dévalorisent beaucoup plus facilement et se mettent beaucoup de barrières (moi la première). C’est sûrement lié à un manque de confiance et peut-être un manque de modèles. La société et les médias ne laissent selon moi pas assez de places aux sports féminins, ce qui est très dommage.
Quel message pourrais-tu livrer aux femmes et aux jeunes filles ayant envie de faire du sport mais n’osant pas ou aux femmes qui se persuadent que le sport n’est pas fait pour elles ?
Que les femmes sont capables d’une grande force mentale qui peut déplacer des montagnes.
À partir du moment où on commence à croire un tant soit peu en soi, on peut faire des miracles. Ce ne sont pas des paroles en l’air ! Par, exemple, j’ai récemment appris que sur certaines courses, le taux d’abandon des femmes passe en dessous de celui des hommes quand les conditions climatiques sont catastrophiques (ex. du marathon de Boston sous une pluie diluvienne cette année).
Franchement, j’ai pu en être témoin et j’ai croisé des femmes au palmarès ou à la vie impressionnante : des femmes avec des parcours de vie chaotiques, avec une vie de famille bien chargée qui réussissent quand-même à s’organiser pour faire une belle place au sport dans leur vie, voire même à faire du sport de haut niveau (tout en jonglant avec une vie professionnelle aussi). Ces femmes ne sont pourtant pas si différentes de nous et ça fait du bien de se dire que si elles en sont capables, alors nous aussi.
D’ailleurs, sur le groupe Facebook de traileuses “Trails entre Elles”, on a des exemples tous les jours de cette volonté et de cette capacité qu’ont les femmes à jongler entre vie personnelle, vie professionnelle et sport. En cas de coup de blues, c’est l’endroit où aller se rebooster.
Donc, si j’avais un dernier conseil à vous donner, c’est de bien s’entourer : fuyez les gens négatifs et nocifs et n’oubliez pas que la solidarité féminine existe vraiment ! Quel que soit votre sport ou celui dans lequel vous n’osez pas vous lancer, il y a forcément un groupe d’entraide entre femmes, réel et/ou virtuel. Et puis si cela n’existe pas encore, qu’est-ce qu’il vous empêche de le créer ?