Hélène est d’une nature curieuse, elle aime expérimenter, pousser des portes et découvrir ses possibilités. Elle pratique plusieurs sports, qui mis bout à bout forment une pratique à part : le triathlon, qu’elle a testé et oublié. Découvrez pourquoi, comment. Let’s Go Girlz !
Quel(s) sport(s) pratiques-tu ? Et à quelle fréquence ?
Je pratique régulièrement plusieurs sports en amateur, sous diverses formes : course à pied (bitume, trail), cyclisme (route, VTT, randonnée et une pratique « utilitaire urbaine » que je ne compte pas dans le sport), natation (piscine, eau libre).
Ma pratique sportive est très fréquente : 5 fois par semaine et les disciplines changent régulièrement en fonction de mes envies et des possibilités (logistique, environnement, météo, etc.).
Quand as-tu commencé le sport et quelles étaient les raisons à l’époque ?
Plus jeune j’ai été dans une école publique expérimentale qui m’a permis de tester beaucoup de sports : optimist, boxe française, tir à l’arc, squash, etc. J’ai toujours pratiqué des activités de plein air non étiquetées « sport » avec ma famille, notamment beaucoup de randonnée. J’ai aussi essayé le kayak et l’escalade sans grand succès.
Adulte, je me suis inscrite dans des cours de gym suédoise pour perdre du poids et me défouler. C’était une période de chômage, j’avais besoin d’une activité pour ne pas m’ennuyer, j’en ai fait quelques années puis je me suis lassée. Les cours collectifs de gym suédoise sont bienveillants (il y a tous types de corps, pas de miroir, les cours sont donnés en cercle etc.) et je pense que rétrospectivement, j’ai eu beaucoup de chance de commencer une activité physique volontaire dans ce cadre protégé. Curieusement je n’assimile toujours pas cette période à du sport.
Je considère que le point de départ de ma pratique sportive a eu lieu, il y a 4 ans, avec le Vélo Tout Terrain. Tout a été très progressif, j’ai ajouté les sports petit à petit au fil des années. Un matin, j’ai décidé d’acheter un VTT et de m’inscrire dans un club, comme ça, sur un coup de tête, après avoir trouvé que ma vie manquait de fun. Cela coïncide avec une rencontre, une personne très sportive qui faisait du VTT et ça semblait lui apporter beaucoup de satisfaction. Moi aussi, j’avais besoin de joie à ce moment-là dans ma vie alors j’ai copié et ça a marché, j’ai accroché et me suis approprié cette pratique ! J’avais, sans le savoir, mis le doigt dans un engrenage qui m’a menée là où j’en suis aujourd’hui.
J’ai aussi copié pour d’autres trucs, qui n’ont pas vraiment marché. Le triathlon ou le renforcement musculaire, j’en suis revenue assez vite.
Où pratiques-tu ton sport et quel est ton spot favori ?
N’importe où je peux le faire, le plus possible en plein air. J’ai des spots habituels car ils sont pratiques en terme de proximité, mais ce ne sont pas mes spots favoris. Pour la course à pied, je vais au parc des rives de Seine proche de mon travail, je nage à la piscine Hébert dans le 18ème arrondissement, je l’apprécie particulièrement parce qu’elle a un plafond en verre. Je n’ai pas de spot habituel pour le vélo, mais un spot de repli quand je n’ai pas de train pour partir loin de Paris, c’est le long du canal de l’Ourcq, pratique et sécurisé.
Sinon en général, je m’adapte, j’explore n’importe quel territoire, ça fait partie de ce que j’aime dans le sport.
Qu’est-ce que t’apporte le sport au quotidien ?
Chaque discipline sportive m’apporte des choses différentes, mais les dénominateurs communs sont :
- une sensation de liberté et d’autonomie incroyable.
- Un refuge où personne ne vient m’embêter, du temps pour penser loin des soucis de quotidien, j’appelle ça du « temps de qualité ».
- Un sentiment de puissance (dans le sens de « capacité »).
- L’idée de contribuer à la cause féministe (à mon échelle, je participe à la visibilisation des femmes dans l’espace public, le sport hors des espaces clos reste encore majoritairement masculin).
Le sport a-t-il changé la vision que tu avais de toi et ta vision du sport en elle-même ?
La vision de moi a assurément changé. Je dis souvent en rigolant qu’en cas d’invasion zombie, j’ai un net avantage concurrentiel car je pourrais nager vite, courir longtemps et pédaler loin. Plus sérieusement, j’ai découvert que j’avais une autonomie en distance. Mon corps peut m’emmener à X kilomètres de mon point de départ et je trouve ça génial. Le corollaire c’est que j’ai découvert que j’étais capable de fournir une grosse quantité d’efforts. J’ai toujours été curieuse et j’aime explorer, le sport est un domaine dans lequel je peux découvrir mes possibilités et créer mon éventail de pratiques.
Enfin, je n’ai pas changé de vision du sport, j’ai simplement découvert que j’avais une vision du sport. C’est un champ de réflexion passionnant qui s’est ouvert à moi et donne à réfléchir sur des sujets que l’on peut également rencontrer dans la vie de tous les jours : l’effort, la motivation, le loisir, l’inné, l’acquis, l’entraînement etc.
Quels ont été ton meilleur et ton pire moment sportif ?
Le pire souvenir est un diptyque de l’enfer : les 20 kms de Paris 2018 et la revanche catastrophique que j’ai voulu prendre sur le semi-marathon de Rambouillet 5 mois plus tard. Ces deux courses sont indissociables pour moi et représentent parfaitement la très désagréable expérience du double échec.
Après un 20 kms de Paris apocalyptique, j’ai juré qu’on ne m’y reprendrait plus. J’ai donc préparé « ma revanche » en mode #nopainnogain sur le semi de Rambouillet en suivant à la lettre un plan d’entraînement corsé. Ce devait être un triomphe en réaction du raté de la course précédente et ce fut un échec cuisant. Depuis, je ne prépare plus aucune de mes course et les crises de panique ne se sont plus invitées.
Le meilleur souvenir est mon premier 150 kms de vélo, seule. L’alliance parfaite d’un gros effort physique et d’un kiff absolu de liberté et autonomie.
Quel est ton prochain objectif ?
Je fonctionne un peu à l’envers concernant les objectifs. Mon objectif global et à long terme, est de toujours me perfectionner dans chaque sport, à mon rythme (cela peut être de plusieurs façons : vitesse, technique, durée, distance etc.). Dès que je sens que je suis prête pour une épreuve officielle qui me fait envie, je m’y inscris. Je ne m’entraîne pas spécifiquement pour une épreuve. Je m’entraîne « au long cours » et je case des épreuves quand je sens que « ça va le faire ». Je sens qu’en 2020, ça « le fera » sans doute pour un marathon trail et un 200 kms de vélo. Je ne sais pas quand, ni où et je me réserve le droit de changer d’avis n’importe quand, même la veille de l’épreuve.
En tant que femme a-t-il été plus ou moins difficile de commencer (et d’exercer) une activité physique par rapport à tes barrières, la société, le regard des autres ?
Il n’est en effet pas rare d’entendre que certaines femmes qui se mettent au sport ont dû se battre contre elles-mêmes pour oser, ou alors qu’il s’agit d’une histoire de « revanche » sur quelque chose (souvenirs traumatiques du sport au collège, des gens qui leur ont dit qu’elles étaient incapables de faire ci ou ça). Pour moi, ce n’est absolument pas le cas car je partais d’un rapport plutôt neutre aussi bien avec le sport qu’avec mon corps, tout en ayant conscience de mon niveau zéro, je suis sur une idée de découverte, pas de revanche. Je me dis parfois que toutes les barrières ne sont pas faites pour « être pétées » tout de suite, tout le temps, parfois on s’interdit des trucs pour se protéger, pour éviter d’être confronté à une situation qui nous fera plus de mal que de bien. Si passer outre une barrière m’expose à un quelconque danger (physique, psychologique, affectif etc.), clairement, je n’y vais pas. Et je ne crois pas du tout à l’adage « ce qui ne te tue pas te rend plus fort. »
J’ai senti des freins sociaux mais ils ne m’ont jamais dissuadée de faire du sport parce que je suis rodée à l’exercice et que je me débrouille, en dépensant énergie et temps, pour les contourner. Ces freins m’exaspèrent, j’essaye de lutter contre et ils ne sont finalement qu’une déclinaison « sportive » de ceux auxquels les femmes sont confrontées chaque jour dans notre société : exclusion, invisibilisation, cantonnement à la sphère privée, manque de temps libre disponible, injonction à la perte de poids, contrôle de l’image.
Deux exemples assez différents pour dépeindre la situation :
- Il n’est pas rare que je sois la seule femme à courir sur la piste d’athlétisme extérieure de mon stade de quartier (alors que la course à pied est une des pratiques les plus mixtes) : un bel exemple de “confiscation” de l’espace public.
- L’offre d’habillement pour cyclistes femmes est infiniment moins importante que pour les hommes. En particulier pour le VTT, l’offre femme est quasi inexistante.
Par ailleurs, j’ai laissé très loin de moi l’idée de lier sport, perte de poids et alimentation. Ça, en tant que femme, on se le prend dans la figure partout tout le temps, y résister n’est vraiment pas une mince affaire. La motivation du sport par la perte de poids n’est pas durable, j’ai décidé que le sport était là pour lui-même, pour le mouvement, pour l’effort et le plaisir. Je refuse de parasiter ma pratique sportive par autre chose. C’est l’une de mes plus grandes fiertés.
Je vais parler du regard des autres en général car je ne me souviens pas en avoir été particulièrement victime en tant que femme sportive. Souvent même, ce que je fais suscite de l’admiration, souvent un poil paternaliste. Je ne parviens pas à faire abstraction du regard des autres alors je compose avec. Ma stratégie n’est pas de clamer haut et fort « je me fous de ce que pensent les autres », j’en suis bien incapable. Ma stratégie c’est de laisser le moins de prise possible à ceux qui voudraient juger ma pratique avec méchanceté. Je suis d’accord que ce n’est pas la solution la plus satisfaisante mais c’est le meilleur rapport efficacité/coût que j’ai trouvé à ce jour pour une pratique sportive apaisée.
Quel message pourrais-tu livrer aux femmes et aux jeunes filles ayant envie de faire du sport mais n’osant pas ou aux femmes qui se persuadent que le sport n’est pas fait pour elles ?
Il existe beaucoup de sports, ne vous forcez pas à en aimer un qui ne vous convient pas, même s’il est très valorisé socialement (ou qu’on vous dit qu’il fait dépenser beaucoup de calories et que c’est bien pour maigrir). Si vous ne vous sentez pas très à l’aise (image, condition physique limitée etc.), il existe des endroits protégés pour débuter et/ou continuer. Je pense au sport-santé et aux groupes en non-mixité, mais il doit y en avoir d’autres. Il est illusoire de « ne pas se comparer » aux autres, nous le faisons tous, tout le temps, de manière quasi inconsciente. Partant de cela, dites-vous qu’on est toujours le lent ou le rapide de quelqu’un, qu’il y a des doués, d’autres non, que c’est comme ça et que ce n’est pas grave. Dès que possible, prenez du recul sur les phrases de motivation toutes faites qu’on vous ressort à toutes les sauces sur les réseaux sociaux.