J’ai rencontré Morgane pendant un évènement des Nanas d’Paname. Nous étions là pour poser en sous-vêtements et prendre possession de notre corps. Autant dire que ce fut une rencontre puissante. J’apprends qu’elle pratique le cabaret burlesque et c’est clairement du sport. Let’s Go Girl !
Quel(s) sport(s) pratiques-tu ? Et à quelle fréquence ?
Je pratique la danse, et plus particulièrement le cabaret burlesque, depuis janvier 2018 à l’École des filles de joie. Le cabaret burlesque, c’est un style de danse qui joue avec les archétypes féminins pour en jouer et les détourner avec humour et provocation car on apprend aussi à s’effeuiller sur scène. C’est un mélange entre le théâtre et la danse.
Je suis 2 à 3 cours par semaine car chaque cours développe un aspect différent de la danse. Le mardi soir c’est l’apprentissage d’une chorégraphie qui change régulièrement, le jeudi soir c’est du renforcement musculaire, le vendredi soir c’est un nouveau cours de gym et de yoga, le samedi c’est principalement un travail de souplesse… Cela permet de varier les cours, de ne jamais s’ennuyer et surtout de se préparer de manière complète pour la scène.
L’école dans laquelle je suis mes cours de danse organise quatre cabarets par an, pour mettre en avant le travail que nous réalisons tout au long de l’année. Nous pouvons y participer ou pas, tout dépend de l’envie de chacune. Ce n’est pas obligatoire.
Quand as-tu commencé le sport et quelles étaient les raisons à l’époque ?
J’ai toujours fait du sport. Plus jeune, j’ai fait de la danse modern jazz et surtout du basket pendant 8 ans. J’étais une petite fille très dynamique, j’avais besoin de me défouler et mes parents ont très vite compris qu’il fallait que je m’occupe, que je dépense mon énergie avec des activités physiques.
Au collège, j’étais dans une classe à horaires aménagés pour que nous puissions nous entraîner au basket le midi. C’est aussi à cette époque que je faisais partie de l’UNSS (l’Union Nationale du Sport Scolaire) où chaque mercredi après-midi nous avions des activités et des rencontres sportives, surtout de la course d’orientation et de l’athlétisme.
Le sport c’était pour moi et ça le reste toujours maintenant, un moyen d’être avec mes copines, de m’amuser et de partager des émotions communes (les encouragements pendant le match, la déception de la défaite ou le joie de la victoire). J’aime la cohésion de groupe qu’apporte le sport, et surtout cette sororité que je retrouve dans la cabaret burlesque.
Où pratiques-tu ton sport et quel est ton spot favori ?
Les cours de danse ont lieu soit au Carreau du Temple, près de République, soit à la FGO Barbara à Barbès. Lors des stages intensifs de répétitions avant les spectacles, nous travaillons dans des studios près de Grands Boulevards. J’aime beaucoup travailler au Carreau du Temple car la salle est immense.
Qu’est-ce que t’apporte le sport au quotidien ?
Au quotidien, le cabaret burlesque apporte une approche différente du corps et de la féminité. Comme nous travaillons sur plusieurs facettes de la féminité (pin up, femme fatale, femme guerrière…), cela permet de découvrir sa propre féminité, unique. Physiquement, ça m’a permis de me muscler, de m’accepter et d’avoir plus confiance en moi.
De plus, dans le cabaret burlesque, il y a aussi le côté effeuillage. Et avant d’arriver à enlever son soutien-gorge sur scène, il faut apprendre à l’enlever devant les autres filles qui suivent le cours. Il faut dépasser sa pudeur et ses complexes mais tout ça se fait très naturellement car aucune des filles ne vient là pour se comparer aux autres ou faire sa belle.
Pendant les cours, on est confrontées à toute sorte de corps différents: petits seins, gros seins, petites fesses, grosses fesses, cellulite… Et à force de voir le corps des autres, on oublie son propre corps. Une certaine distance se créée car on n’est plus simplement centrée sur ses propres complexes. On voit la beauté des autres et on accepte la sienne, différente mais tout aussi valable.
« C’est un vrai travail d’acceptation de soi qui passe par la bienveillance et la sororité. »
Un cours de burlesque me met en joie, je suis épuisée après chaque cours et en même temps je suis pleine d’énergie et euphorique. C’est comme un boosteur.
Le sport a-t-il changé la vision que tu avais de toi et ta vision du sport en elle-même ?
Le sport m’a permis de dépasser ma zone de confort et d’oser : danser, jouer de ma féminité, apprécier mon corps, monter sur scène, montrer mon corps tel qu’il est.
Le cabaret burlesque m’a aussi permis de me connecter à mon corps dans l’effort mais aussi dans le plaisir. J’ai un rapport plus apaisé avec mes grosses fesses, ma cellulite et mes petits seins et ça m’apporte une plus grande sérénité !
Je n’avais pas la vision de l’effort avant le burlesque. C’était avant tout le partage entre copines, mais aujourd’hui je découvre cet aspect performance et j’aime ces challenges personnels que je me fixe en plus de ma bande de copines que je retrouve.
Quels ont été ton meilleur et ton pire moment sportif ?
Mon meilleur moment c’est quand je monte sur scène et le pire moment, c’est juste avant de monter sur scène quand le stress monte.
Quel est ton prochain objectif ?
Mon prochain objectif c’est de monter sur scène pour le prochain cabaret et de me surpasser en réussissant une chorégraphie qui me permet de sortir de ma zone de confort (soit au niveau technique soit au niveau de « jeu d’acteur »).
En tant que femme a-t-il été plus ou moins difficile de commencer (et d’exercer) une activité physique par rapport à tes barrières, la société, le regard des autres ?
Les cours de cabaret burlesque que je suis sont exclusivement féminin donc c’était plutôt facile de m’y retrouver. Par contre, la grande difficulté avec cette pratique c’est effectivement le regard des autres et l’acceptation des autres.
Pour ma part, je n’ai pas eu trop de difficulté à assumer car mon petit ami, ma famille et mes amis acceptent et me soutiennent dans cette démarche. Mais il n’en sera pas toujours de même dans le milieu professionnel et je dois faire attention à cela.
Se déshabiller sur scène ne veut pas dire que nous sommes des filles faciles, cela veut simplement dire que nous sommes maîtresses de nos corps et que nous décidons ce que nous voulons en faire.
« Le cabaret burlesque c’est cette réappropriation du corps féminin: affirmer sa féminité dans une démarche féministe. »
Quel message pourrais-tu livrer aux femmes et aux jeunes filles ayant envie de faire du sport mais n’osant pas ou aux femmes qui se persuadent que le sport n’est pas fait pour elles ?
Faites du sport si vous en avez envie, parce que je vous le voulez, parce que ça vous fais du bien et parce que ça vous rend heureuse !
Ne faites pas du sport pour de mauvaises raisons, ne pousser pas votre corps au-delà de ses limites. Le sport doit rester un moyen de se connecter avec son corps, d’entamer une relation saine avec lui.