Marjorie a 24 ans, elle a choisi de pratiquer un sport pour la première fois à 19 ans, c’est une jeune femme déterminée qui apprend à se faire confiance et à se lancer des objectifs avec son handicap moteur. Let’s Go Girlz !
Quel(s) sport(s) pratiques-tu ? Et à quelle fréquence ?
Je pratique la musculation en salle de sport 2 à 3 fois par semaine notamment avec une coach personnelle, Sybile coach (qui, avant d’être spécialisée, est surtout une coach qui s’adapte à ses élèves, selon les particularités de chacun).
Quand as-tu commencé le sport et quelles étaient les raisons à l’époque ?
Je n’ai pas pu choisir de sport avant mes 19 ans car les structures n’étaient pas adaptées à ma situation et la vision de la société sur mon handicap était un vrai frein. Pour la société, je ne pouvais pas faire de sport, c’était impensable.
J’ai donc commencé par faire du rugby fauteuil à l’âge de 19 ans grâce à mon copain qui en faisait. Le rugby m’a permis de ressentir beaucoup d’adrénaline, je me dépensais, je découvrais un sport aux antipodes de mon caractère (assez violent et sociable, moi qui suis plutôt pudique et solitaire). J’en ai fais pendant 3 ans puis j’ai arrêté parce que je n’avais plus la même vision que le coach sur le long terme.
L’année dernière, j’ai découvert la musculation. Je me suis renseignée pour trouver une coach handisport et j’ai adoré ! La musculation me permet dans un premier temps de bouger, de me muscler et dans un second temps de dépasser certaines de mes craintes.
Où pratiques-tu ton sport et quel est ton spot favori ?
En salle de sport à Paris, chez Fitness Park place de Clichy. J’adore la salle, je ne m’entraînerais pas ailleurs.
Qu’est-ce que t’apporte le sport au quotidien ?
Au quotidien, le sport m’apporte pas mal de courbatures. Mais c’est surtout l’adrénaline que je ressens que j’aime, je me sens mieux dans mon corps et dans ma tête. C’est aussi un facteur de sociabilité, le sport m’aide à m’ouvrir aux autres.
Quand je pratique la musculation, je prends conscience de mon corps, je découvre de nouvelles zones de mon corps, je le redécouvre. J’ai été manipulé toute ma vie par des inconnus, dans le cadre médical. Grâce au sport, je me réapproprie mon corps, je choisis de le toucher, de le mettre en difficulté et d’y prendre soin. Le sport est un moyen de reprendre possession de mon corps : j’habite mon corps. C’est mon partenaire de vie, je fais donc beaucoup plus attention à lui.
Le sport a-t-il changé la vision que tu avais de toi et ta vision du sport en elle-même ?
Je n’ai jamais été une sportive avant mes 19 ans et ça n’a jamais fait partie de mon caractère auparavant. La vision sur moi-même et l’idée que je me faisais du sport, étaient des freins. Il existe une fédération nationale handisport, avec différents clubs, mais qui ne m’ont jamais particulièrement attirée. J’aimerais insister sur le fait que le handisport était très peu connu et médiatisé, et l’est encore trop peu. Clairement le sport a changé de façon significative l’image que j’ai de moi. Je suis fière quand je progresse, je me dépasse et je pousse mes limites mentales. Je titille même certaines barrières de mon handicap physique.
Je percevais le sport comme une torture, j’imaginais que tous les sportifs souffraient et étaient en difficulté constamment. Depuis que je pratique, je me dis que c’est une façon de vivre, c’est une thérapie pour moi, le sport est intégré dans mon quotidien et ce n’est que du positif qui me permet de découvrir mes capacités physiques et mentales. Le sport est devenu un besoin mental et physique.
Quels ont été ton meilleur et ton pire moment sportif ?
Mon pire souvenir reste la première séance de musculation avec ma coach. Ce fut une sacrée claque physique et mentale. J’ai cru ne pas pouvoir continuer.
Mon meilleur moment est la première séance où j’ai travaillé sans mes appareillages aux jambes, ça pour moi c’était un moment complètement dingue. Et je compte bien en revivre d’autres comme ça. Quand j’ai commencé à faire de la presse jambes, pour moi, c’était un exploit de enfin pousser avec mes jambes, alors qu’il m’est difficile de tenir dessus au quotidien.
Quel est ton prochain objectif ?
Mon prochain objectif à court terme est de participer à un bootcamp en Grèce organisé par ma coach, je serais la seule avec un handicap moteur, j’ai hâte de vivre ce moment. Sur le long terme, j’aimerais participer à une compétition.
En tant que femme a-t-il été plus ou moins difficile de commencer (et d’exercer) une activité physique par rapport à tes barrières, la société, le regard des autres ?
Je sais qu’il y a des regards sur moi un peu surpris mais surtout admiratifs et c’est uniquement ceux que je garde. Il m’est parfois difficile de demander à un homme de « partager » une machine, mais j’y travaille. J’ai du dépasser le regard et le jugement de certains hommes qui n’étaient pas bienveillants et c’est une belle victoire.
Quand les gens voient mon fauteuil roulant, ils me regardent du coin de l’œil, surpris mais bienveillant et certains viennent me féliciter pour mon « courage ». Je les remercie, mais on a tous du courage!
Quel message pourrais-tu livrer aux femmes et aux jeunes filles ayant envie de faire du sport mais n’osant pas ou aux femmes qui se persuadent que le sport n’est pas fait pour elles ?
Je vous comprends, ne commencez pas forcément seule et n’écoutez pas ceux qui pourront vous dire que ce n’est pas votre place. Chacun s’occupe de ce qu’ils ont en bas des reins. Et puis, il y a forcément une activité physique qui vous fera briller les yeux et battre le coeur !