Marine a 26 ans, elle pratique la capoeira depuis 10 ans. Bien plus qu’un sport, c’est devenu un art de vivre pour Marine, elle se dédie entièrement à son sport et est devenue une athlète. Découvre son parcours et sa vision du sport centrée sur l’humain. Let’s Go Girlz !
Quel(s) sport(s) pratiques-tu ? Et à quelle fréquence ?
Je pratique la capoeira. Je m’entraine au moins 4 fois par semaine. (au moins 1h par entrainement). En complément je fais de la musculation principalement en salle.
Quand as-tu commencé le sport et quelles étaient les raisons à l’époque ?
J’ai commencé enfant par la gymnastique, mon grand frère étant lui-même pratiquant. J’ai pratiqué pendant plusieurs années, je ne me sentais pas à l’aise dans mon justaucorps, je me trouvais ronde par rapport aux autres petites filles. J’y allais à reculons, notamment pendant les compétitions. J’ai donc arrêté la gymnastique et choisi l’équitation. J’adorais les chevaux, les sensations fortes (avec les sauts d’obstacles), le lâcher prise, le lien avec l’animal, j’en ai fait jusqu’à mon adolescence.
J’ai découvert la capoeira en 2008 par une amie. Elle m’avait proposé de tester un cours avec elle, je n’avais pas vraiment envie, j’étais même un peu réticente. J’y suis allée malgré tout et j’étais rincée après le premier cours d’essai, j’ai pratiqué une année avant d’arrêter suite au festival de clôture de fin d’année. J’ai été tétanisée lors de mon baptême et je n’ai pu participer à la roda (la roda est un cercle formé par les capoeiristes au sein duquel deux d’entre eux jouent la capoeira). Suite à cet échec, je n’y suis pas retournée.
Deux ans plus tard j’ai repris dans un autre groupe de capoeira et c’est là que j’ai eu le déclic. Je parlais à des copines de la capoeira et je me suis rendue compte que ça me manquait, que j’avais envie d’y retourner.
Où pratiques-tu ton sport et quel est ton spot favori ?
Je pratique au sein du groupe Muzenza France principalement en salle dans un lieu qui s’appelle Maisons Pour Tous à Noisy-Le-Grand. Sinon je préfère pratiquer en extérieur quand on fait des démonstrations ou dans les salles avec une bonne acoustique.
Qu’est-ce que t’apporte le sport au quotidien ?
Beaucoup de choses. A travers la capoeira je me développe personnellement, je relève des défis et je progresse de jour en jour. Par exemple, j’apprends à m’exprimer en public car la capoeira se pratique dans une roda (cercle) avec deux joueurs en son centre. Tous les regards sont dirigés sur les deux capoeiristas et le public réagit aux jeux.
La capoeira m’a forgée, je peux transposer ce que ce sport m’apporte dans ma vie professionnelle et personnelle et inversement. C’est devenu un art de vivre, le fait de rester humble, de prendre du recul, de devenir plus sage et à l’écoute de soi et des autres. J’ai énormément appris sur moi grâce à la capoeira, j’ai beaucoup plus confiance en moi, j’accepte plus de choses, j’ai moins de peur du regard des autres et je combats mes peurs.
Le sport a-t-il changé la vision que tu avais de toi et ta vision du sport en elle-même ?
La capoeira est une aire de jeux pour se découvrir et découvrir le monde. Quand j’ai commencé, j’étais très timide et introvertie. J’avais énormément de mal à m’exprimer. Maintenant je peux exprimer mes sentiments beaucoup plus facilement. La capoeira m’a apportée sur beaucoup d’aspects. J’étais sportive, je suis devenus une athlète. Je suis dédiée à mon sport que ce soit dans mon organisation du quotidien, ma nourriture, ma disponibilité.
Avant le sport était juste une activité physique, il y avait le côté ludique. Aujourd’hui, le sport est un outil complémentaire à ma vie, il est source de partage, de rencontre, c’est un vecteur de connexions. La capoeira est un sport complet car c’est à la fois du physique mais c’est aussi de la musique, du chant, de l’histoire, de la culture, une philosophie, une langue (portugais), du combat, de la danse et surtout des échanges d’énergie.
Quels ont été ton meilleur et ton pire moment sportif ?
Mon meilleur moment fut lorsque j’étais au Brésil avant le championnat du monde de janvier 2020. J’ai passé deux semaines dans une ferme isolée sans internet, sans réseau et juste avec mon contra-mestre – la capoeira est enseignée dans des écoles spécialisées, appelées académies, où règne une hiérarchie très précise entre le Maître (o Mestre) et ses élèves. En dessous du Maître, il y a le contre-maître (contra-mestre ou mestrando), puis le professeur, l’instructeur et le moniteur (ou graduado).
Nous nous sommes entrainés deux à trois fois par jour avec un rythme particulier. On faisait principalement du technique avec beaucoup de répétitions de mouvements et de séquences de jeux. C’était deux semaines géniales car je me suis découverte. J’étais déterminée et concentrée dans mon championnat qui avait lieu une semaine après. En plus j’avais mon contra-mestre avec moi qui me donnait tous les conseils dont j’avais besoin pour progresser. J’ai fait un énorme travail mental pendant ces deux semaines.
Mon pire souvenir, c’est le jour où j’étais candidate pour passer ma première corde, on appelle ça le baptême. Ce n’est rien de religieux mais juste l’évènement qui signifie ton entrée dans la capoeira. Je m’étais entrainée une année avec 5-6 personnes dont le professeur. Le jour du baptême, il y avait plus de 200 personnes, je devais entrer dans la roda et jouer. J’ai fait une crise d’angoisse et je ne suis jamais revenue. Sauf deux ans plus tard, dans un autre groupe. Cette épreuve m’a mis une claque et m’a remise en question. Finalement il ne faut pas rester sur sa première impression. Ce n’est pas tant comment ça commence mais plutôt comment ça termine qui est important : tout est question d’évolution et je n’aurai pas fait ce chemin si j’étais restée sur ma peur et mon blocage.
Quel est ton prochain objectif ?
Ayant participé au mondial en janvier 2020, j’aimerais participer à des championnats internes et externes. Le prochain championnat est l’européen prévu en novembre 2020. Et à plus long terme, devenir professeure de capoeira.
En tant que femme a-t-il été plus ou moins difficile de commencer (et d’exercer) une activité physique par rapport à tes barrières, la société, le regard des autres ?
Oui totalement surtout que la capoeira est un sport très masculin. De plus en plus de femmes percent dans cet art mais nous sommes encore peu nombreuses. La hiérarchie dans ce sport est très importante et par exemple dans mon groupe nous avons seulement une femme qui est Mestre. Les autres femmes sont professeures. Entre le premier titre de mestre et le 3ème degré de professeur, il y a 3 degrés de contra-mestre ce qui fait un écart de 6 ans.
C’est donc difficile de monter en grade car le chemin est long. Trouver sa place n’est donc pas facile et cela demande du temps. Mon contra-mestre se démarque en cherchant à mettre en valeur et en avant les femmes capoeiristes de sa coordination.
Quel message pourrais-tu livrer aux femmes et aux jeunes filles ayant envie de faire du sport mais n’osant pas ou aux femmes qui se persuadent que le sport n’est pas fait pour elles ?
Osez faire du sport ! Ne vous arrêtez à ce que disent les autres. Faites-le pour vous, enlevez vos jugements et vos préjugés. En bougeant on apprend et pour moi c’est par le sport qu’on peut se découvrir autrement. Chaque chose en son temps, la patience est de rigueur mais avec la détermination et l’envie tout est possible.